08 novembre 2006

Moment magique

Classe TC, troisième cycle. La semaine dernière, lendemain d'Halloween, l'enfer. La plupart sont drogués au sucre, les autres sur des trucs illégaux et pas mal plus puissants. Ils ont terminé le cours dans leur classe. La moitié d'entre eux doivent garder la tête couchée sur le bureau. Je suis bête et méchant. Je ne me laisse pas monter dessus par des kids de onze ou douze ans qui fument du pot. Ce n'est pas bon pour eux de contrôler les adultes et comme je veux leur bien : "cou-couche panier, pa-pattes en rond!".

Ce matin, ils entrent calmement. Ils prennent place en silence et attendent que le cours commence. Je me dis que l'intervention facho de la semaine dernière n'a pas été vaine. J'avais prévu faire du djembé, mais comme ils semblent disponibles, aussi bien en profiter. Je vais leur faire jouer un truc de Beethoven sur le thème du deuxième mouvement de la septième symphonie (j'suis allergique à l'hymne à la joie).

On commence par écouter le mouvement. Je leur explique que c'est presque un canon (pas celui que vous pensez), mais pas mal plus long que Frère Jacques (j'y suis aussi allergique). Je n'abuse pas. Fade out. Quoi? Ils sont toujours attentifs! Je saute sur l'occasion. Des exemples d'utilisation du silence en musique. Dans le classique, dans le heavy métal, dans Eminem... On déconne un peu avec le début de la cinquième. Les silences, c'est tellement évocateur. Pas seulement en musique. On en parle, puis on commence.

Beethoven n'avait rien à prouver à personne. Une mélodie dont les douze premières notes sont des "mi"... Vive l'économie de moyen. Quelques notes plus loin, le silence qui tue.

Moi : Je sais... c'est un peu plate mon truc. Pas très groovy, mais faites-moi confiance. Vous allez fredonner cet air en sortant de l'école ce soir. Je vous imagine déjà : mi... mi mi mi... mi... mi... mi mi mi.... mi.... mi... mi fa# sol... sol... sol... sol sol sol... silence qui tue! Ça repart : sol... sol la si... etc...

Et les voilà qui essaient de me convaincre qu'ils trouvent ça bon. Ils sont même très convaincants... On se fait le thème ensemble une autre fois et je leur donne un petit moment pour nettoyer les coins sales (je parle de musique). Je m'approche de l'éducatrice.

Moi : Coudon! Ils sont sous la menace ou quoi?

Elle : Mets-en!

7 commentaires:

Dobby a dit…

Rien d'autre à dire que... profitez-en, comme on dit "un ange passe...". Pas dit qu'il va toujours être là, mais je vous le souhait. Ils ont vraiment de quoi à apprendre en musique, et je ne parle pas des connaissances. Je parle des moeurs ;)

Anonyme a dit…

Je me souviens de mes supers cours à l'université jadis... Il y a 3 choses qu'on ne devait pas utiliser en éducation: Menace!!!! Dénigrement!!! Sarcasme!!!

Pourtant...

Les 3 armes qui fonctionnent en enseignement...
Menace:
La preuve a été faite par prof malgretout!
Sarcasme: Les kids ne comprennent généralement pas toute la finesse d'une pointe de sarcasme!!! Alors pourquoi se priver des plaisirs de la vie.

Je n'irai pas jusqu'à dire dénigrement car c'est un bien vilain mot, mais remettre un p'tit baveux à sa place ça fait du bien aux deux... Le prof et l'enfant... Disons qu'ils l'utilisent déjà beaucoup entre eux. Pour le petit caïd, il est bon de vivre l'envers de la médaille... Ça replace!

Il reste un grand secret...
Le moyen d'émulation: À ce sujet, je n'ai qu,un mot: Kalachnikov!!

Prof Malgré Tout a dit…

Le plus drôle, c'est que la menace ne venait pas de moi, mais de leur titulaire qui en avait plein le casque de leurs niaiseries. Imbu de moi-même comme je suis, je me pensais seulement intéressant.

Josée a dit…

Par contre, pour ma part, il est clair que j'aurais aimé avoir un prof de musique comme toi au primaire !

Et aussi dans mon école de maintenant... passons.

OMO-ERECTUS a dit…

L'agresseur, c'est celui qui profère les menaces ou celui qui en récolte les bénéfices?

Heureux de vous retrouver, PMT, moi qui suis allé se ressourcer outre-atlantique, pour une trop courte vacance.

O-E

Anonyme a dit…

Beethoven, malgré son immense talent, n'est peut-être pas un des premiers compositeurs à faire auditionner par des enfants non-initiés au classique. Mes 3 enfants écoutent du classique depuis leur naissance et les symphonies de Beethoven ne font pas partie de leur audiothèque car je juge qu'ils ne sont pas encore prêts. J'ai commencé par des extraits de pièces plus accessibles. Ils ont vu et entendu ces derniers jours sur Lime Wire, le concerto d'Aranguez (Aranjuez) de Rodrigo interprêté par John Williams. Il y a eu un de ses silences magiques.... Le professeur de musique à notre école primaire est aussi un homme. Il se sert de pas danses que les enfants exécutent pour leur faire sentir le mouvement. Tu resterais surpris des vidéos de Barbie. Ils sont superbes et leur bande sonore est composée intégralement de musique classique. Même les garçons aiment les visionner. Enfin ce ne sont que petites suggestions.

Miss Patata a dit…

La répression y'a qu'ça d'vrai!