22 décembre 2007

C'est arrivé loin de chez vous

L’hiver annonce ses premiers orages sur la vallée. Pluie, grêle, tornades... rien de bon pour l’agriculture. Mais lorsqu’elle scrute l’horizon qui s’assombrit, ce ne sont pas les récoltes qui inquiètent Fatima. Elle cherche plutôt la silhouette d’Osmane. Lorsque la guerre vous vole un mari et deux filles, chaque attente amène son lot d’angoisse et chaque jour est vécu comme le dernier.

La veuve lutte pour détacher son regard des champs. Le ciel gronde et Fatima se souvient des bombardements en regardant les éclairs percer le crépuscule. La porte s’ouvre. Osmane est grand pour son âge. Déjà, ces mains sont celles d’un menuisier et son regard sombre, celui d’un homme. L'ombre de son père, il se dirige lentement vers elle, la prend dans ses bras.

«Je suis désolé...»

«Il y a de la soupe chaude.»

«Nous avons terminé de construire l’école.»

«Je n’aime pas le Hezbollah.»

«Mère...»

Osmane ne termine pas sa phrase. Le tonnerre sait imposer le silence. Puis soudain, la grêle qui s’abat sur les collines. Un roulement de caisse claire, régulier et imperturbable. La nature veut effacer la mémoire de cette terre gorgée de sang et de métal. La première explosion retentit. Osmane ressert son étreinte. Un autre choc fait trembler les murs. Tant de souvenirs de dévastation. Suivra le feu d’artifice. Des dizaines d’explosions se succèdant et arrêtant le temps.

Et enfin, le silence.

Puis, l’attente.

Osmane n’ira pas à la cave chercher son arme. Pour chaque explosion qu’il vient d’entendre, un enfant libanais ne perdra pas ses jambes sur une mine.

Israël aurait largué quatre millions de bombes à sous-munitions sur le sud du Liban en 2006. Un million d’entre elles n’auraient pas encore explosé. Les victimes seront des civils. Si un grêlon gros comme une noisette peut les faire sauter, imaginez un enfant.





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16 décembre 2007

Alléluia

21hoo et des peanuts, un dimanche soir de tempête.

Dring... Dring...

PMT : Bordel! Qui ose?

Dring...

PMT : Oui allô?

Éducatrice en TC : PMT?

PMT : Huh?

Éducatrice cool en TC : C'est Éducatrice cool en TC . Je t'appelle pour la chaîne téléphonique.

PMT : Dans le sens de...

Meilleure éducatrice en TC : C'est fermé demain!

PMT : Sérieux?

Déesse en TC : Mes sources sont infaillibles.

PMT : Ça donne le goût d'aller fermer un bar...









Pour ceux qui n'ont pas encore compris : Pas d'école demain!!!





Profitez-en pour aller lire "Le monde en saignant". (Il va me payer la bière...)





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12 décembre 2007

Le pouvoir des mots

Il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir des mots.

Même si ce blogue est une oeuvre de fiction et que je n'existe pas (je suis en réalité l'ami imaginaire d'un poseur de gypse qui se nomme Roger), cette anecdote est vraie.



Je me tapais une tour en Mega Bloks avec fiston et la destruction de notre dernière création avait foutu un beau bordel. Il y avait des blocs partout, sauf à portée de main.

PMT : Hum... J'aurais besoin des blocs qui sont là-bas...

Fiston : ...

PMT : Fiston, regarde les blocs là-bas.

Il daigne jeter un coup d'oeil.

PMT : Donne-les à Papa.

Il retourne à son complexe architectural.

PMT : Fiston...

Il entend une voix, mais présume que c'est dans sa tête et considère qu'il est un peu jeune pour qu'on lui diagnostique une maladie mentale. Vaux mieux tenir ça mort, qu'il se dit.

PMT : Fiston... Regarde-moi!

Bzzzzzz...

PMT : Amène les blocs à Papa.

Fiston : Très solide la tour... Gros tour!

PMT : Fiston... Tching Kawong!

Il me regarde.

Je pointe les blocs.

Il va les chercher, me les donne.




Il s'agissait seulement de trouver le mot juste.













Mise à jour : Désolé pour le tas de fautes... J'ai corrigé.

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09 décembre 2007

Prof Story : Le Confessionnal

Version polie :

Ça me trotte dans la tête depuis un bout.

Version honnête :

Ça me les casse.


Peu importe la version, je vais une fois de plus abuser de votre patience afin d’exorciser quelques démons. La routine, quoi.

Voici donc, en primeur :

Prof Story : le Confessional

Le Maître : PMT, rends-toi immédiatement au confessionnal.

PMT : Oui Maître!

PMT s’empresse d’obéir, espérant se faire confier une mission qui lui permettra d’améliorer ses conditions de travail et qui sait, abolir la loi 142.

Une fraction de seconde plus tard, au confessionnal.

Le Maître : Te voilà.

PMT : Oui Maître, me voilà. Vous vouliez me voir?

Le Maître : Pourquoi t’aurais-je demandé de venir si tel n’était pas mon voeu?

PMT : Effectivement Maître, vous êtes d’une logique implacable.

Comme le Maître n’est en réalité que mon alter ego, pourquoi me gênerais-je pour le complimenter?

Le Maître : Même si la démagogie t’a toujours bien servi jusqu’à maintenant, c’est inutile d’en faire usage avec moi. Ça pourrait te porter malheur...

PMT : Dans le sens de «ballotage»?

Le Maître : Mais non, imbécile. Je suis dans ta tête. Si le public choisit de ne pas te garder, je devrai errer dans les limbes pour l’éternité. Alors, au lieu de dire des sottises, voici ce que j’ai à te dire...

PMT : ...

Le Maître : ...

PMT : ...

Le Maître : Alors? J’attends.

PMT : Mais Maître... c’est vous qui aviez quelque chose à me dire.

Le Maître : PMT, comme je suis un produit de ton imagination, tu peux très bien dire toi-même ce que j’ai à te dire.

PMT : Vous êtes fort.

Le Maître : Tu dis ça pour te faire plaisir...

PMT : Donc, vous voulez savoir pourquoi j’ai l’air troublé depuis quelques jours?

Le Maître : Exactement. Ça n’aurait pas à voir avec un certain «documentaire»?

PMT : Vous êtes vraiment perspicace Maître.

La Maître : En effet. Parle, minable.

PMT : Ce qui me tracasse avec le documentaire, c’est que j’ai l’impression de collaborer à un freak show et qu’à la toute fin, ce sera moi qui tiendrai le rôle principal.

Le Maître : Rôle principal? Toi? Mais c’est un documentaire sur les élèves. Pas sur toi.

PMT : Oui, mais dans la catégorie freak, je risque de voler le show.

Le Maître : Tu es déjà sur la bonne voix.

PMT : Merci Maître, je suis votre exemple.

Le Maître : Comment oses-tu?

PMT : Mais non Maître. Pas «suis» dans le sens du verbe suivre, mais plutôt dans le sens du verbe être.

Le Maître : Tu es très habile PMT.

PMT : Je suis votre exemple.

Le Maître : ...

PMT : ...

Le Maître : Un-zéro pour toi PMT, mais ma vengeance sera terrible.

PMT : Ballotage?

Le Maître : Tu oublies vite...

PMT : Ah oui... les limbes.

Le Maître : Exactement. Alors, qu’est-ce qui te porte à croire que tu seras le freak en chef du documentaire? Ça va de soi que tu seras ridicule, mais j’aimerais l’entendre de ta bouche.

PMT : Vous voyez Maître, les gens du documentaire ont choisi des élèves «puckés». Le genre d’élèves qui n’écoutent pas, ne te regardent pas, ne font rien et n’apportent pas grand-chose au projet. C’est plutôt le projet qui, à long terme, leur apportera quelque chose.

Le Maître : Je ne vois pas le problème. C’est tout à ton honneur.

PMT : C’est ce que je croyais au début... Mais dans la pratique, ça ne se passe pas exactement comme ça. Disons que je suis en pleine séance d’écriture avec les enfants et qu’un de leur sujet n’écoute pas et est complètement décroché. Ils s’approchent de lui et le filment pendant qu'il joue avec son crayon (il n’aime peut-être pas les caméras...). Il lâche son crayon et finalement, se referme sur lui-même...

Le Maître : Tu laisses passer?

PMT : Moi, ma job de prof, c’est de le sortir de sa torpeur et de le faire participer. Le problème, c’est que lorsque j’interviens sur un élève qui n’écoute pas et que c’est filmé, j’ai l’impression que c’est humiliant pour l’élève. J’n’en ai rien à cirer que ça sera coupé au montage ou que plus tard, ils le montreront sous un jour meilleur (c’est prévu pour quelle date déjà le jour meilleur?), l’humiliation est là sur le moment et quand tu entres dans la catégorie «no futur», t’as tendance à vivre dans le présent.

Le Maître : «No futur»? Tu es conscient qu’il y a plein de gens qui te lisent et qui n’attendent que ça? Que tu exposes tes préjugés! «No futur»... Espèce de salaud! Mais cause toujours, tu m’intéresses.

PMT : J’ai donc le choix : humilier un enfant ou ne pas faire ma job. S’il n’y a pas de caméra en classe, c’est beaucoup plus facile. Les jeunes ont parfois besoin de se faire rentrer dedans. Rarement devant leur confrère, mais jamais devant une caméra. Ce n’est pas que je ne veux pas être filmé en pleine intervention sur un jeune, au contraire, je me trouve bon. C’est pour l’enfant que je trouve que ce n’est pas éthiquement acceptable.

Le Maître : Mais qui es-tu pour juger de ça?

PMT : Je n’ai pas grandi dans un bungalow avec une piscine derrière. Encore moins sur le Plateau Mont-Royal avec des parents intellectuels ou artistes. J’en ai plein le dos du tourisme communautaire : "Allons voir les pauvres. Allons leur montrer qu’on pense à eux et que ça peut changer... " Ils vont être où après, les gens du documentaire?

Le Maître : Après quoi?

PMT : C’est comme les gens qui prennent l’avion et ensuite parcourent des centaines de kilomètres en Jeep et qui appellent ça de l’écotourisme. Moi j’appelle ça de la pollution.

Le Maître : On les haït les cons en VUS, hein?

PMT : Mets-en... C’est un peu le même truc avec la pauvreté.

Le Maître : Tu hais les pauvres?

PMT : Mais non. Je méprise ceux pour qui la pauvreté est une destination touristique.

Le Maître : Mets-en... Ils veulent avoir la conscience tranquille.

PMT : Et en plus, ça pogne.

Le Maître : Et c’est un bon filon...

PMT : Quand tu ne peux pas te payer un voyage dans le tiers monde...

Le Maître : Ce n’est pas très politicaly correct comme déclaration...

PMT : Quelle merde...

Le Maître : À qui le dis-tu? Tu veux un autre scotch?

PMT : Pourquoi pas... Il reste de la bière?

Le Maître : Of course!

PMT : J'aime bien une bière avec mon scotch.



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07 décembre 2007

Inside incluse

Je fais composer des mélodies par les élèves. Par la suite, j’en sélectionne quelques-unes qu’on arrangera selon les besoins du spectacle. Il ne reste plus qu’à écrire des paroles, faire un enregistrement, graver des cds, les vendre un mois avant les représentations, lors d’une expo-école par exemple et voilà : un hit est né.

***Attention, voici une inside pour ceux qui connaissent le projet. Les autres, vous n’avez qu’à me bummer des billets en mai.***

C’est toujours sympa de voir des techniciens qui ont bossé sur les shows de nos grands artistes fredonner une toune composée par un kid de 11 ans.

***Fin de l’inside.***


Pourquoi je vous raconte ça? C’est pourtant clair : si je n’écris pas, vous ne me lisez pas et si vous ne me lisez pas, je ne pourrai plus vous endoctriner lentement... mais surement... oui... c’est ça... ma voix est douce... ton corps est de plus en plus lourd... tes bras son lourds... tes paupières sont lourdes... hey...t’as pris du poids dernièrement?

N’importe quoi.

Donc, y a cette élève complètement géniale qui est bolle, athlète, artistique et surtout, sympathique. En bonus, elle est blonde. La dernière fois qu’elle m’avait composé un truc, elle avait bien suivi la recette, mais cette fois, comme tout est trop facile pour elle, je lui ai demandé quelque chose de plus original.

Bordel. Elle m’a composé une toune en 7/4 qui ne sonne pas trop weird et je sais exactement dans quelle partie du spectacle je vais la mettre.

Comme mes élèves sont les plus cools au monde (en musique seulement. Ils me les cassent quand on écrit le texte...), on a testé le truc pendant un cours sans que ça rouspète trop. Ensuite, j’ai demandé à un élève groovy de trouver un rythme qu’un blanc pas trop deux de pique réussirait à faire.

Voici ce que ça donne. Pas d’arrangement. Mélodie et djembé.







Quand on a joué le machin à leur prof (oui lui, celui qui veut toujours m’allaiter, mais je refuse car j’ai une blonde.... et il est poilu), il a tout de suite vu que c’n’était pas une toune normale. On c’est donc mis à parler de ces musiques qui ne sont pas en deux, trois ou quatre temps, mais qui sonnent faciles. Y a «Take five» de Dave Brubeck (ça ne me tente pas de chercher c’est qui le compositeur...). J’ai aussi fait jouer un bout de «Supper’s ready» de Genesis. Oui, le bout en 9/8 et pour finir, comble de délectation, le deuxième mouvement de la sixième symphonie de Tchaikovsky.








Bordel! C’est en 5 temps et on dirait une valse. Ya l’air de rien comme ça, mais y connaît vraiment la job ce Piotr Ilitch. Dommage qu’on nous les casse avec toujours Craque-Pinotte.


La pognez-vous? Nous les casse... Casse-Noisette... Casse-Couilles... Oui! C’est ça!




Bah...

04 décembre 2007

Une brique et un fanal

Jeudi soir, c’est la rencontre des parents pour les bulletins. Je pense que de toute ma carrière, ça ne m’a jamais aussi peu tenté.

Premièrement, dans mon école, pour plusieurs raisons que je n’exposerai pas maintenant, il n’y a pas de communication concernant le cours de musique dans le premier bulletin. Mais je dois quand même être là pendant la soirée "rencontre pour les bulletins".

Oui, je sais. On nage en pleine logique.

Bah! Comme je vous aime bien et que j'aime bien faire le contraire de ce que je dis, je vais tout de même vous expliquer un peu pourquoi je n’écris rien dans le premier bulletin.

Les enfants n’ont qu’un cours de musique par semaine. Si on considère les absences, les journées pédagogiques et les congés fériés, j’ai vu la plupart des enfants seulement une dizaine de fois depuis le début de l’année. Disons qu’ils sont 30 dans le groupe, ça fait deux minutes par enfants par cours. Donc, dix cours à deux minutes par cours, ça fait vingt minutes.

Vingt minutes pour évaluer trois compétences... Et là, je n’aurais fait que des évaluations. Je n’aurais pas pris les présences et encore moins enseigné.

On se revoit au prochain bulletin?

Hein? À ce qu’il paraitrait, en classe j’aurais dit, fait, sous-entendu, pensé ou imaginé quelque chose de bizarre, douteux, violent, vulgaire, etc. ?

Désolé de péter votre bulle, mais ce soir, on parle du bulletin de votre enfant et je n’ai rien mis dans ledit bulletin. Pour mon procès, prenez un numéro et attendez qu’on ouvre, ce soir, on est fermé.

Ah? Vous voulez seulement qu’on parle un peu de votre enfant... Huh? Vous voudriez que j’adapte un peu mon enseignement à votre petit chéri?

Avec le projet, je vois environ 350 enfants par semaine et je connais le prénom du vôtre. pas pire, hein? Malheureusement, je n’ai pas le temps de construire une cabane à moineaux avec lui pour tisser de meilleurs liens.

Quoi? Ce n’est pas moi qui dois changer? Vous voulez seulement que j’envoie sa candidature pour la charmante petite école. Franchement! Si ce n’est que ça, fallait le dire plus tôt!

En passant, dernièrement, j’ai trouvé un autre CPE pour mon fils, car je n’étais pas satisfait de celui qu’il fréquentait.

...

D’après vous, est-ce que j’ai demandé à son éducatrice de lui dénicher une place ailleurs?

...

Avez-vous des questions concernant le bulletin de votre fils? Non? Alors, prenez un numéro.

...

Une lettre de référence avec ça?




Coda

Le pire, c'est que je vais me barrer les pieds à l'école jusqu'à 10h00 avec des parents sympathiques et dieu sait qu'il y en a!





...

02 décembre 2007

Théologie... musicologie... symbolisme? Pfff...

Y’a une des écoles du projet qui est très multiethnique. Pas trop, juste très. J’aime ça les écoles multiethniques parce que je n’aime pas les ghettos. Y a déjà eu une grosse clique de Jamaïcains dans cette école(watchalookin’at?), mais ils sont maintenant noyés dans le tsunami d’élèves venant d’Asie du Sud-Ouest.

Bon... j’avoue que la seule petite Québécoise de souche se sent un peu tout seul de sa gang, mais elle a juste à retourner dans son pays si ça ne fait pas son affaire. Tu traverses un boulevard et tu te retrouves chez les blancs francophones su’l’BS.

Bon, revenons à notre mosaïque culturelle.

Vous devinez donc que le soir, quand avant de fermer les paupières, ils font une dernière prière, ils ne s’adressent pas tous au p’tit Jésus. Ce n’est tout de même pas une raison pour ne pas en parler. On a quand même remis le compteur des années à zéro à sa naissance. Vous en connaissez beaucoup des gens pour qui on a fait ça? Par contre, je préfère en parler sans trop le nommer. On ne sait jamais...

Donc, je présente aux élèves, les bouts de musique du projet sur lesquels on va mettre des paroles. La routine, quoi...

PMT : Bon... là, ce que je vais vous faire entendre, c’est la musique lorsqu’on est chez Ulrica pour la première fois. Pas dans notre histoire, dans l’histoire originale. Dans l’opéra de Verdi. Écoutez très attentivement quand le choeur va chanter.

On écoute le truc en question







PMT: C’est cool hein quand le choeur chante?

Un élève : Comme un film d’horreur.

PMT : Exactement! Et nous, on va faire encore plus épeurant.

L’élève : Comment?

PMT : En utilisant un truc que j’ai piqué à Jean-Sébastien Bach... D’abord, voici à peu près l’arrangement qu’on va en faire.

On écoute le machin.








Soyez indulgents. Ce n’est qu’une maquette et faut faire simple au début. Ce sont des kids de 11 ans qui n’ont jamais fait de musique qui joueront dans les spectacles. Ils ont une seule répétition par semaine pendant quatre mois et n’ont pas d’instrument pour pratiquer à la maison. Les partitions, on oublie ça. Tout par coeur. En plus, il faut faire sur des petits claviers à 300$ et des instruments de percussion dont la moitié m’appartiennent (sont donc cheap...). Le plus pire, c’est qu’au théâtre, ça groove grave. Je plogue la guit électrique et on s’éclate. J’vous ai dit qu’il y a des élèves jamaïcains? Je n’ai jamais vu un élève jamaïcain poche en musique (faut dire que je ne fais pas de flûte à bec...).

Un élève : C’est comme genre la même affaire tsé, mais avec comme genre un beat.

Un autre : Yo! Y a pas de chorale?

PMT : Pas pour l’instant. C’était des machines qui jouaient et j’ai enlevé les bouts trop tough. Là, il faut réécrire des paroles en français.... avec le truc de Bach.

L’élève : C’est quoi son truc?

PMT : Une fois, Bach a écrit l’histoire d’un gars qui se fait clouer sur une croix par une gang de Romains.

Un élève : Je l’sais c’est qui!

PMT : Et on n’a pas besoin de le savoir... Alors, ce type qu’on clouait sur les planches, il n’était pas très friqué.

Un élève : Hein?

Un autre : Pas ri-che!

PMT : Ouais... y’était menuisier ou un truc du genre et ça ne payait pas trop dans le temps. Alors, pendant qu’on le vissait ben comme faut sur sa croix pour pas qu’y tombe et blesse quelqu’un, y a la gang de Romains qui jouaient aux dés pour savoir qui allait garder ses affaires... Parce que, devinez quoi... il va mourir!

L’élève : Ah! Je l’sais c’est qui!

PMT : On le sait tous, mais c’est comme dans Harry Potter, on ne dit pas son nom.

L’élève : Hein?

PMT : Laisse faire... Alors, pendant que le type saigne en masse, les autres jouent aux dés. Pas cool du tout. C’est même épouvantable. Y’avait pas grand chose à faire tirer le gars sur la croix. Une paire de sandalle, une tunique... C’est là que Bach a eu une bonne idée. Il s’est dit que si les paroles faisaient : patapouf, paf paf, boum boum patapouf, ça ne ferait pas très tragique. Il a donc choisi des mots avec beaucoup de «s» et de «ch» pour imiter le sifflement d’un serpent, qu’on associe souvent au diable. Ça peut donner un truc dans le genre : (je le chante sur la mélodie en question) Sasha s’achète du sushi et sèche sa chemise... On va faire la même chose.

Un élève : C’est qui Sasha?

PMT : Un castor modifié génétiquement pour exterminer la race humaine... Mais il est amnésique, donc y a pas de danger pour l’instant.

Un élève : On peut l’entendre la musique du serpent?

PMT : Malheureusement, je ne l’ai pas avec moi...


Pfff. C’est presque vrai ce que je leur ai raconté. Y a seulement un problème, la toune est en majeur et ça déménage plus que «swing la baquaisse dans le fond de la boîte à bois» et on dirait que le choeur est sur les stéroïdes.

Mais comme je vous aime bien...

J.S. Bach
extrait de la Passion selon Saint-Jean









L’évangéliste

Après avoir crucifié Jésus, les soldats prirent ses vêtements et ils en firent quatre parts, une part pour chaque soldat. Ils prirent aussi sa tunique, qui était sans couture, d’un seul tissu depuis le haut jusqu’en bas et ils dirent entre eux :

Choeur

Ne la déchirons pas, mais tirons au sort à qui elle sera.
Swing l’évangéliste dans le fond de la boîte à bois.






















...