30 décembre 2006

Ti-bonhomme pendu





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23 décembre 2006

J-L

En sixième, un élève a été arrogant avec moi hier. Appelons-le J-L. Contrairement aux autres élèves à qui j'enseigne depuis qu'ils sont petits, je ne connais pas J-L. C'est un nouveau et c'est normal pour un nouveau de tester les adultes... Mais il faut choisir ses batailles. Je venais d'avertir la classe. Ils avaient dépassé les limites et devaient respecter les consignes à la lettre. C'était facile : rien dans les mains. Après deux avertissements du regard, J-L reprend encore son crayon pour dessiner sur son cahier. La conséquence préalablement annoncée? Dehors! Pas en dehors de la classe. En dehors du projet. Oui, LE projet. Le show devant 5000 spectateurs. J-L ne connaissait pas et n'avait rien a foutre du projet. Ce sont ses mots : " j'en ai rien à foutre!". OK. T'es out mon homme et j'appelle chez toi de ce pas.

Ma séance se termine. Les élèves ont un cours de gym et je descends avec eux pour téléphoner aux parents de J-L.

Collègue : "Je peux te parler avant que tu téléphones?"

Moi : "Oui?"

Collègue: "Pas devant les élèves."

Moi (borné) : "J'appelle maintenant."

Collègue s'approche de moi et m'entraîne à l'écart.

Collègue : "Tu fais ce que tu veux, mais je veux juste te prévenir, tu vas appeler dans une maison refuge pour femmes battues."

Moi : "Ouais pis? C'est pas une raison pour manquer de respect aux enseignants!"

Collègue : "Je voulais juste te prévenir..."

Merci Collègue. Je ne suis plus très certain pourquoi, mais je n'ai pas appelé tout de suite et ensuite, j'ai oublié.

Le lendemain.

Prof de gym : "Tu as ramassé J-L d'aplomb hier?"

Moi : "Mets-en! D'ailleurs, il faut que j'appelle chez lui aujourd'hui. Comment tu sais que je l'ai ramassé?"

Prof de gym : "Les autres étaient fâchés contre lui. Même ceux de son équipe lui lançaient des ballons par la tête."

Moi (surpris): "Hein? Qui ça?"

Prof de gym: "Blondie et la petite clique branchée."

Moi : "Ouch... ça veut dire qu'il est pas mal rejet là?"

Prof de gym : "D'après toi?"

La fleur et le pot. Mes élèves s'en prennent à un flo qui me manque de respect. Assez particulier et je vous avoue que ça me fait un velour. Mais que le jeune devienne rejet... Bordel! J'ai l'impression de faire partie d'une clique d'élèves. No way! Un jeune avec un père violent. C'est pour lui que le projet existe. En plus, le type avec qui il va travailler sur les décors est un homme extraordinaire qui sait tirer le meilleur des enfants et leur balancer en pleine face.

Je devais donc faire ce qu'il ne faudrait jamais faire.

Je me pointe dans sa classe. Il reste 20 minutes avant le départ pour les vacances. Les élèves sont en cercle. J-L est seul à son pupitre. Il n'a pas l'air triste. Il a vu pire.

Moi : "Hey Collègue, tu me prêtes J-L pour quelques instants?"

Collègue : "Pas de problème."

Les autres le regardent comme on regarde un condamné manger son dernier repas...

OK. J'en mets un peu. Disons qu'ils se disent que J-L est vraiment dans la... Un mélange de compassion et de "tu l'as cherché".

Dans mon local, je tends une bouteille d'eau à J-L.

Moi : "Je t'offrirais bien une bière ou un café, mais c'est illégal."

J'ouvre ma bouteille. Il ouvre la sienne. On boit en silence. Il ne faut pas que je parle trop. Droit au but, on règle ça rapidement.

Moi : "Avant d'appeler chez toi, comme je ne te connais pas encore, je me suis renseigné. Je ne te raconterai pas d'histoire. Disons que je sais pourquoi tu as déménagé..."

Lui : "..."

Moi : "Je veux que tu fasses le projet. Sincèrement."

Lui (timidement) : "Moi aussi je veux le faire..."

Moi : "C'est réglé! Maintenant que tu sais que je suis un gros facho, tu fais attention hein?"

Lui : "..."

Moi : "Tu joues aux échecs?"

Lui : "Oui! Je suis bon!"

Moi : "Excellent, je vais te planter et tu n'auras pas d'autre choix que de reconnaître ma supériorité intellectuelle."

Lui : "On a que 10 minutes."

Moi : "C'est ben en masse."

On se pointe dans sa classe. On dirait une mise en scène. Nous sommes d'un sérieux... Les élèves essaient de nous lire en vain. Nous prenons place, de chaque côté de l'échiquier.

Moi : "Prépare-toi à périr simple mortel."

Lui : "Jamais!"

Blondie (vraiment surprise) : "Hein? Vous allez jouer aux échecs? Ensemble?"

Moi : "J'aurais aimé mieux la lutte dans la boue, mais c'est un peu salissant."

Quelques badauds s'approchent du jeu.

Un badaud : "Come on J-L, il faut que tu battes Prof Malgre Tout!"

Un autre : "Ouais! Vengeance!"

Je lance un clin d'oeil à J-L. Il ne le voit pas. Ces yeux sont déjà rivés sur l'échiquier.

Moi : "En passant, j'habite ton quartier... je vais souvent au parc V*** avec mon fils. Si tu me vois, tire-moi une balle de neige."

J-L : "Et si y a pas de neige?"

Moi : "T'as pas le choix, tu viens me dire salut."

Je suis fier de moi... Vraiment fier. C'est raide d'être nouveau dans cette école. En sixième, on en a eu deux cette année. J-L et une jeune fille africaine. Elle vient d'un pays en guerre. Là-bas, elle n'est pas une ado, elle est une jeune femme. Disons que les soldats se foutaient pas mal de la Convention de Genève dans son coin du monde. Mais même quand tu arrives de l'enfer, c'est encore difficile d'être nouveau.

C'est sûrement le billet le plus prétentieux de ma carrière de blogueur. Ça doit être vraiment insupportable à lire, mais... c'est MON blogue.

Joyeux Noël!




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22 décembre 2006

Promotion d'un site

reussirlareforme.qc.ca

Vraiment pathétique. Voici un site pour promouvoir la réforme... allez voir qui sont les signataires. La proportion d'enseignants parle d'elle-même.

Le site

Les signataires : des conseillers pédagogiques, des professeurs (université), des directeurs, etc... Des gens qui n'enseignent pas vraiment, mais qui aiment bien dire aux autres comment le faire...







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20 décembre 2006

Dring...

Dring...

Bah...

Dring...

Blonde : "Tu réponds?"

Dring...

Moi : "Grrr..."

Dring...

Moi : "M'emmerde..."

Dring...

Moi : "Argh!!! C'est quoi encore?"

Je n'aime vraiment pas le téléphone. Je suis grognon et antisocial et j'adore ça.

Moi (pas sympa du tout) : "Oui allô!"

Une voix : "Prof Malgré Tout?"

Moi : "Ouais..."

La même voix : "C'est Roger!"

Moi : "C'est ça... salut Roger!"

Un petit comique... Y en a qui n’ont vraiment rien à faire... que j'me dis.

La même voix plate : "Blonde Malgré Elle est là?"

Oups. J'oublie toujours que Beau Père Malgré Lui s'appelle Roger.







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19 décembre 2006

Hummm... Rudolph

C'est banal, mais ça prend de la neige pour qu'on se sente Noël. Sans le grand manteau blanc, pas d'effervescence.

Ce matin, première année. À la fenêtre, quelques flocons.

Moi: "Vous connaissez le resto "Frite Alors!"?"

La classe : "..."

Moi : "C'est un resto de hamburgers et de frites. Ils ont un hamburger qui s'appelle Rudolph... Un hamburger de caribou. Vous savez ce que c'est un caribou?"

Blazé : "J'y vais avec mon père..."

Moi : "Merci pour cette magnifique tranche de vie, mais ce n'était pas la question."

Ti-smatte : "Un hibou?"

Moi : "Nope... C'est un renne."

Blazé : "Je le savais."

Ti-cute : "Un renne... Comme pour le traîneau du Père-Noël?"

Moi : "C'est pour ça que le hamburger s'appelle Rudolph. Hum... c'était délicieux!"

Ti-smatte : "Quoi ça?"

Moi : "Rudolph."

Ti-Cute : "Hein?"

Ti-smatte : "Rudolph... le petit renne au nez rouge?"

Moi : "Je sais... c'est cruel , mais je n'ai pas pu résister. Hum... ça goûte bon du renne."

La classe : "Ouach!!! Méchant! Dégueu... etc..."

Moi : "Non non! C'était succulent. Avec des frites!"

La classe : "Miam miam.. des frites."

Ils boufferaient le Père-Noël lui-même si c'est servi avec des frites...

Ti-cute : "Regardez! Il neige!"

Toute la classe se tourne vers la fenêtre. Tous les yeux brûlent d'espoir, sauf une paire.

Blazé : "Il fait -2... ça ne restera pas."

Le pire, c'est qu'il a raison.

13 décembre 2006

Sex, Drugs and Rock'n Roll

Il y a huit ans, au début de ma carrière, ma rencontre avec les élèves de sixième année fut un choc. Bien entendu, j'étais conscient que les choses ne seraient plus "comme dans not' temps". Par contre, je ne savais pas que pour plusieurs flos de 12 ans, un vendredi soir se résumait à un 6 pack, une couple de joints et une partie de jambe en l'air. OK. Pas tous les élèves. Mais je ne parle pas d'un cas isolé non plus. En passant, je n'enseigne ni à Outremont, ni à Westmount. Ça joue un peu plus dur dans mon coin...

Heureusement, on a Floppy. Mais comme je suis daltonien, je ne peux pas vous dire de quelle couleur est Floppy. J'ai le choix entre brun ou gris... Est-ce que ça se peut un chien vert? Bah... L'important, c'est que sous Floppy, il y a un orifice, et dans l'orifice, il y a une main. La main fait bouger Floppy et Floppy explique aux ti-namis comment faire un message d'explication. Cool hein? Tu te calmes, tu dis ce que tu n'as pas aimé et tu proposes une solution. Tu te calmes, tu expliques ce que tu as fait et ce que tu feras la prochaine fois. Tu te calmes, tu expliques ton problème et bla bla bla... Tu te calmes! Je sais... ce n'est pas facile avec une main dans l'orifice, mais Floppy, c'est un pro. Un pro de quoi? À vous de juger. On s'en balance, ça marche.

Donc, on se la coulait presque douce depuis quelques années avec des élèves à jeun...

Ben non... C'est reparti. Trois jeunes de onze ou douze ans, un gars, deux filles, les yeux dans la graisse de bines. Moi le con, je n'allume pas qu'ils sont stones. C'est leur prof qui me l'a confirmé ensuite.

Moi : Salut Roger! Quoi de neuf?

Élève (exaspéré) : On peut-tu jouer là...

Ça, ça serait la réaction normale d'un élève à jeun de sixième année. Voici à quoi j'ai eu droit :

Moi : Salut Roger! Quoi de neuf?

Blondie : Cooooool! Roger...

Le gars : Hi hi hi.. Roger... Hé hé hé...

Brunette : Heille!!! On peut-tu jouer à la planète Choco?

C'est un jeu pour les maternelles...

Moi : Non... On a du boulot. Aujourd'hui, on compose pour le projet.

Blondie est couchée sur le gars.

Moi : Hey vous deux! C'est interdit de se reproduire en classe...

Le gars (sourire fendu jusqu'aux oreilles) : Ok. Hi hi hi...

Moi : Et assis-toi comme il faut.

Le gars (vraiment "vedge"): Hi hi hi...

Il s'exécute au ralenti... Je commence à avoir des doutes.

Je sépare la classe et laisse les trois travailler ensemble. Au moins, ils ne dérangeront personne. Il leur faut composer une mélodie sur des paroles déjà existantes. Ils doivent respecter la prosodie. Je me doute qu'ils ne feront pas grand-chose, mais je les laisse travailler dans un local tout près où je les ai à l'oeil.

Avant la fin de la période, les élèves partagent avec les autres leurs créations et je prends tout ça en note pour le projet. Bordel... Les trois ont bien travaillé. Ce n'est pas normal... À jeun, ils n'auraient rien foutu. Même que ce que Blondie m'a fait est pas mal du tout. Elle reçoit des félicitations de la classe. Dans le doute, le test ultime. Je m'assoie au synthé et sélectionne des sons assez psychédéliques merci... Quelques accords plus tard.

Le gars : Man... woooooo... c'est trop buzzé!

Blondie : Fait Eminem!

Brunette : Cool... C'est comme Pink Floyd.

Moi : Hein?Tu connais Pink Floyd?

Brunette : Mon père en écoute plein.

Le gars : Refais le son buzzé...

Moi : Quel son?

Le gars : Hein?

Moi : Quel son buzzé?

Le gars : Heu... N'importe quel sur ton affaire là...

Moi : Ça?

Je mets le paquet.

Il a tellement tripé que j'en ai presque rigolé. On aurait dit Ronnie, le personnage de Daniel Lemire

Je pense que si je leur avais fait entendre du Gentle Giant, ils auraient aimé... Pas normal.

À la fin de la journée, leur prof partage son doute avec moi. On se rend à l'évidence. Ils ont fait un méchant trip de dope sous notre nez. Allez-y! Flame on. On est au primaire bordel. On est plus à l'affût des ronds de pipi et des chicanes sur les règles de ballon chasseur que des élèves qui fument des joints.

Oui, il y a eu un retour sur tout ça. Non, pas de police et pas de direction. De toute façon, on n’a pas de preuve... Les parents? La mère de Blondie a déjà mis son point sur la gueule d'une prof pour l'avoir gardé en récupération pendant une récréation (elle ne faisait pas ses devoirs...). La bonne femme avait tinqué toute la nuit. Je ne connais pas les parents des autres, mais Blondie est la moins "puckée" des trois. Ça me donne le goût de les connaître?

Les enfants ont besoin d'une approche relationnelle dans ce genre de cas. On est là pour instruire, socialiser et qualifier (ça vient du Ministère!), pas pour les mettre dans le trouble et pour avoir la paix (ça vient du gros bon sens). Juste quelques mots bien pesés font la job parfois... Une fois dégrisés (eux, pas nous), leur prof les a rencontrés.

Leur prof : "Vous savez, ce n'est pas parce qu'on ne dit rien qu'on ne sait rien."

Juste ça, appuyé par le regard qui transperce l'âme, mais sans faire de mal.

Brunette : Untelle ne l'a pas fait...

Et voilà. C'est de la bonne graine quand même. Au lieu de nier, elle protège leur copine innocente.

À suivre...














08 décembre 2006

Rencontre de parents

Un moment où beaucoup de profs se font littérairement chier dessus par des parents...

Moi, en tant que prof de musique à statut précaire, je ne prends pas de rendez-vous. Vous voulez me voir? Suivez les flèches (surtout que je n'évalue pas les élèves pour la première étape...).

Sur la porte de ma classe : de retour vers 18h.

18h10

Moi : Elle n’est pas mal du tout ta soupe tonki mon amour!

Ma blonde : Pas trop pire pour une première, mais il manque un parfum.

Moi : Plus de gingembre?

Ma blonde : Non... du basilic.

Moi : Ah! Mais bon, avec la lime, c'est quand même très bon.

Ma blonde : C'est quand ta rencontre de parent?

Moi : Ouais... faudrait peut-être que j'y aille...

18h30

Deux mères d'élèves et une gamine m'attendent à la porte de mon local.

Mère #1 : Ouais... il est 6h30...

Moi : Je sais.

Mère #2 : C'est écrit 18h sur la porte.

Moi : Désolé?

Mère #2 : Sur la porte... Vous avez écrit que vous seriez là à 18h.

***On me cherche?***

La gamine (deuxième année, élève surprotégée et faible en académique et par le fait même en musique) me regarde. Elle veut savoir c'est qui le plus baveux entre moi et sa mère. Je lui lance mon regard "du pain et des jeux avec ça?".

Moi (bullshitant): Ah... C'est un vieux message que j'ai oublié d'enlever. Vous aviez un rendez-vous avec moi?

Mère #1 (elle sait que je la bullshite) : J'avais rendez-vous avec l'enseignante de ma fille à 17h45. J'attendais de vous rencontrer avant de partir.

Moi : J'enseigne à trois cents élèves ici. Je ne connais pas les horaires de tous les parents. Donc, vous m'attendiez et n'aviez pas de rendez-vous... Vous êtes bien téméraire Madame.

Mère #2 : Mais vous devriez être disponible pour nous rencontrer...

Moi : D'où ma présence ici madame. Le département des plaintes, c'est en bas dans le bureau du directeur. Il se fera un plaisir de couper le temps sur ma paye pour ma petite absence de ce soir... Mais attendez! Non... ça ne marchera pas... je ne suis pas payé pour être ici ce soir.

Ok. Là, il y en a qui se disent : No way! C'est dans ta tâche. Ben je les emmerde parce que ma tâche en enseignement, elle est tellement bustée que je n'ai que 4 minutes par jour pour la récupération, les communications aux parents et tout autre truc qui n'est pas de nature personnelle. Les profs "normaux" entrent quelque chose comme une heure par jour dans cette case.

Moi : Mais entrez donc! Venez voir le local.

Mère #2 entre avec sa fille. L'autre préfère attendre à l'extérieur (je me demande pourquoi...). Elle s'éclipsera assez vite sans me dire au revoir.

Moi : C'est ici que votre fille reçoit 60 minutes de musique par semaine, s'il n'y a pas de journée pédagogique ou de congé la journée de son cours, bien entendu. Lorsque que l'élève entre en classe, il choisit lui-même une place, mais je me réserve le droit de les déplacer à n'importe quel moment sans donner de raison ou de préavis. Un seul but : le développement global de l'enfant via l'apprentissage de la musique. Ici, c'est le Nautilus Plus du cerveau.

Mère #2 : Est-ce qu'ils jouent de la flûte?

Moi : Non et je crois que si votre fille jouait de la flûte, vous l'auriez sans doute remarqué. Les flûtes sont strictement interdites dans ce local. Je considère que la colonne d'air n'est pas prête à leur âge et que ce n'est pas un instrument qui doit être joué 20 personnes à la fois... surtout s'ils ont sept ou huit ans.

Mère #2 : Alors, ils jouent du xylophone comme ça?

Elle pointe un glockenspiel.

Moi (à sa fille) : Explique-lui.

Gamine : Xylo veut dire bois et phone veut dire son. Ça c'est en métal, c'est un carillon.

Moi : Le vrai nom serait glockenspiel, mais le milieu de l'enseignement préfère carillon... Je suis plutôt conformiste, alors je dis comme eux. Si on a déjà visité l'Oratoire St-Joseph, on voit bien que ce ne sont pas de vrais carillons...

Mère #2 : ...

Moi : D'autres questions?

Mère #2 : Est-ce que les enfants se comportent bien? J'ai entendu dire que certains élèves de sa classe étaient pas mal turbulents.

Moi : Ils n'ont pas le droit d'être turbulents dans mon local.

Mère #2 : Mais s'ils le sont quand même?

Moi : Ils ne le sont pas. C'est interdit. À sa fille. Y en a qui niaise ici?

Gamine : Non, y a seulement toi qui a le droit.

Moi : Excellent, tu auras une bonne note dans ton prochain bulletin.

Mère #2 : ...

Moi (soudainement chaleureux): Écoutez madame. Je suis vraiment désolé. Comme vous voyez, je suis un peu sur la défensive. Vous connaissez le quartier... Toutes sortes de gens... S'il y a quoi que ce soit, n'hésitez pas à me laisser un message et ça me fera plaisir de vous contacter.

Mère #2 (perplexe) : ...

Moi : C'est vraiment gentil d'être venu. J'adore rencontrer les parents de mes élèves. À sa fille. Salut ma puce.

La petite vient dans mes bras me faire un calin. Elle se tourne vers un coin de la classe.

Gamine : Salut Roger!

La madame ne comprend plus rien... Elle se pousse. NEXT!

Ça peut sembler un peu rude de ma part, mais croyez-moi, après quelques années dans le même milieu, quand un parent vient pour essayer d'avoir la tête d'un prof parce qu'il n'y avait rien de bon à la télé ce soir-là, ça se sent.

L'an prochain, je lui demande ce qu'elle fait comme métier et je suis certain qu'on va bien rigoler.

Pas vous!

Moi et elle... ensemble.

C'que vous pouvez être tordus...

Blague à part. Il n'y a pas beaucoup de parents qui viennent me voir. Ce sont toujours les mêmes. Un type qui tripe sur la paléontologie et les ordinateurs Apple. Pendant qu'on se bidonne, sa fille tape sur les djembés et sa femme désespère.

J'ai rencontré une maman algérienne qui est archéologue. Pas de travail pour elle ici... Elle est devenue éducatrice en petite enfance. Belle discussion. Elle a fait son deuil de l'archéo. D'une certaine manière, j'ai fait mon deuil de la musique en venant enseigner. Mais bon, regarder un bébé humain, c'est faire l'archéologie de notre espèce. Héhéhé... c'était n'importe quoi à la fin de la conversation.

En passant, les Berbères aiment vraiment quand on sait ce qu'est un Berbère. Faut croire qu'ils ne sont pas habitués...

Les ancien élèves qui se pointent...

En résumé, c'est quand même rigolo les rencontres de parent quand on est "juste" prof de musique.

01 décembre 2006

Get a life

En plein cours avec des élèves de première année, une main se lève. Dans les yeux de l'élève, la panique totale.

Moi : Oui...?

L'élève : Je pense que je t'ai vu hier.

Moi : Vraiment? Ben moi aussi, je suis allé dans votre classe pour parler à ton prof.

L'élève : Non... c'était à l'épicerie.

Moi : Ça se peut très bien. Je suis allé à l'épicerie hier.

L'élève : ...

Moi : Ça te pose un problème?

L'élève : Ben... c'était le soir.

Moi : Ouais... parce que le jour, on était ici. Assez implacable comme logique hein?

L'élève : Oui mais... c'était pas à l'école.

Moi : Toi aussi tu as remarqué? L'épicerie n'est pas l'école!

L'élève : Mais avec toi... y avait une femme.

Moi : Ma blonde...

L'élève : Pis un bébé...

Moi : Mon fils...

L'élève : Oui mais...

Moi : Mais quoi?

L'élève : Non... Laisse faire...

Et voilà! Un de plus qui vient de comprendre. J'existe en dehors de l'école. Ma blonde n'est pas un prof de l'école et en plus, il ne la connaît pas. Mon fils n'est pas qu'une photo sur un mur. J'ai une vie!

Un peu plus tard dans le même cours, je déconne un peu avec Roger quand soudain, un morceau de calorifère s'effondre sans raison.

Moi : Bordel Roger! Je t'ai dit de ne plus jouer avec le calorifère.

Vous auriez dû voir la tête de l'élève. Si je vais à l'épicerie avec une femme et un bébé, tout est donc possible... même Roger!