L'inquisition

C'est pour bientôt... Chaque mot, chaque geste, chaque expression seront scrutés, décortiqués, psychanalysés puis digérés et s’il n'y a rien de bon à TQS ce soir-là, rapportés à mon patron le lendemain (si bien entendu, il n'y a toujours rien de bon à TQS... ce qui risque de se produire).

" Bonjour Patron "

" Entre Prof Malgré Tout... "

" Vous vouliez me voir Patron? "

" Tu peux t'asseoir "

" Bon, j'ai dit quelque chose ou bien j'ai fait quelque chose? "

" Je suis certain qu'il y a une explication... un parent prétend que tu sacres en classe... "

" Mais voyons donc, je ne sacre même pas dans la vraie vie... " (De l'ostie de bullshit)

" Oui, oui, je sais " (Wow, encore de la ...)

" Bon... qu'est-ce que j'ai dit? "

" Tu aurais dit cibole "

(Soulagement... Quand je déborde verbalement, je n'utilise jamais celui-là.)

" Mais voyons... c'est impossible!!! " (Et là, je dois vraiment sonner honnête!)

" Tu aurais dit cibolak aussi... " (Ben là... c'est un complot?)

" Franchement... je peux savoir c'est qui l'élève? "

" Non " (Il est vraiment éthiquement irréprochable! M'énerve...)

La semaine suivante.

"Je peux vous parler Patron?"

"Oui, assieds-toi." (Il ne pourrait pas dire "assis" comme tout le monde?)

"Quand je sacre en classe, c'est en troisième année?"

"Peut-être..." (Vlan... en plein dans le mille. L'éthique a quand même ses limites.)

"On joue le deuxième mouvement de Carmina Burana. L'arrangement sonne vraiment bien en passant..."

"Je connais" (Il dit la vérité.)

"En ré mineur" (Et il sait ce que ça veut dire, mais il est trop poli pour me dire qu'il sait que c'est en ré mineur... m'énerve...)

"Ça donne : la, sol, la, si bémol, la, sol, la. Plein de si bémol suivit de la." (Je parie qu'il le savait...)

"Je ne suis pas certain de te suivre" (Enfin! Je jubile! C'est moi l'éminence suprême en terme de musique dans cette école! Personne n'est sensé pouvoir me suivre... même pas le Patron.)

"Ben... pour un élève un peu endormi, ça peut donner: la, sol, la, cibole, cibolak, la, sol... Un truc du genre..." (Et je vous en épargne.)

Et voilà. Ça m'arrive assez régulièrement et le pire, c'est que lorsque j'en échappe vraiment un devant mes élèves de sixième, j'ai droit au réconfort total : "T'inquiète pas, on te "stoulera" pas..."

Un de ces quatre, je tergiverserai sur les coups de pied que j'inflige aux élèves de première année pendant leur cours de musique... C'est quand même étrange qu'on n’ait même pas besoin de prendre un numéro pour porter plainte... ça doit être la réforme... ésotérique, hermétique ou obscure?