05 septembre 2011

La sexualité des barytons : un paradoxe spatiotemporel.

Vous savez, on déconne souvent qu’un opéra, c’est un ténor qui veut se taper une soprano, mais y a une basse qui ne veut pas.

C’est tellement vrai. Aujourd’hui, pour des raisons strictement professionnelles — c’est tellement mon genre... — je relisais le propos des Noces de Figaro et ça m’a frappé en pleine face : Almaviva est devenu baryton!

N’aillez crainte, chers non-initiés, on n'est pas snob et on va tout vous expliquer. L’opéra Les noces de Figaro de Mozart, ainsi que Le barbier de Séville de Rossini sont tous deux inspirés d’une trilogie de Beaumarchais. Lui, c'est du théâtre qu'il fait.

Le tout se déroule à Séville. Pourquoi Séville? Pour ne pas se mettre dans le trouble. La noblesse n’aime être le sujet de leur sujet. Remarquez, ça aurait très bien pu être Le barbier de Bruxelles

Donc, à Séville, y a ce type, le comte Almaviva et un serviteur très futé qui s'appelle Figaro. Dans le premier volet de la trilogie (Le barbier de Séville), le comte est un bon gars qui veut se faire Rosine, une mezzo. Figaro, lui, est baryton. Il aidera Almaviva à conquérir le coeur de Rosine. C'est joué à l'opéra en 1816 : Il barbier di Sivigia de Rossini. Un délice.

40 ans plus tôt, Mozart composait Les noces de Figaro qui est en réalité la deuxième partie. Et oui, comme dans Star Wars. Sauf que Mozart, aussi génial soit-il, ne peut deviner qu'un autre compositeur portera à l'opéra la première partie. Alors, il regarde son monde et décide: Almaviva sera baryton. Vous vous dites sûrement : «oui , mais il veut coucher avec tout le monde… Il devrait être ténor, non?». Et bien, non. Le ténor est trop naïf. Il a quelque chose d'héroïque… le pauvre. Si tu veux te faire tout ce qui bouge, faut que tu sois baryton. Mais attention : il n'est pas totalement méchant, sinon il serait basse comme Don Giovanni. Malheureusement, la théorie de l’alcool et de la cigarette ne peut être retenue.

Vous êtes toujours là?

Rosine, devenue entre-temps la comtesse Almaviva, a retrouvé sa candeur de jeune fille! Elle est passée de mezzo à soprano. Incroyable, hein? Que voulez-vous? Le comte la délaisse et les choses sont un peu à rebours dans le contexte.

Vous voyez? Tout ça, c'est super logique!

Ah oui… Y a aussi Chérubin qui n’était pas du barbier, mais qui débarque dans les noces. C'est un mec qui veut s'envoyer lui aussi tout ce qui bouge, incluant sa tante la comtesse et femme d’Almaviva. Héhéhé... Mais comme c'est plus un ado qu'un homme, Mozart a décidé que le rôle serait tenu par une mezzo-soprano. Pas de castra… J'vous ai dit qu'il court tout ce qui porte un jupon? Il n’a pas vraiment le casting de l’eunuque. Le plus sympa, c'est qu'à un moment, il doit se déguiser en fille pour arriver à ses fins. On a donc une chanteuse qui joue le rôle d'un gars qui doit se déguiser en fille. Avouez que ça vous excite. Mais c'est tout de même un romantique: quand sa voix muera, il sera ténor… jusqu'à ce qu'il soit blasé, lui aussi.

J’arrête ça là sinon ma blonde va me faire faire des vocalises, question de vérifier quelque chose...

Voici un extrait du barbier. Almaviva se déguise en soldat et fait semblant d'être saoul. Il demande l'asile chez Bartolo, le tuteur de Rosine qui est aussi amoureux d'elle.

Il barbier di Siviglia de Gioacchino Rossini, extrait du premier acte.




Mozart aurait aimé ça.

Ça va toujours pour les tirets?




...

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Vive la rentrée et le bonheur de lire tes explications délirantes!

Tu m'as manqué PMT!

AVa

Le professeur masqué a dit…

PMT: tu sais, pour ma part, pour des raisons esthétiques, je préfère les tirets aux parenthèses. Le tiret, c'est horizontal, ça donne une lecture fluide. La parenthèse, c'est une verticale molle qui brise le rythme, un genre de «Regardez-moi!»

J'aime - passionnément - les tirets.

Prof Malgré Tout a dit…

Le mien est plus long que le tien.

Pimpette a dit…

À mon très humble avis, mais ça se peut que Mozart aurait pas été d'accord avec moi, Chérubin va arrêter de courir après tout ce qui porte jupon quand il aura mué.

Là, il est dans la complète excitation de l'ado. Il découvre la femme et ça le chamboule pas à peu près. C'est juste dans l'ordre des choses pour son âge et il me semble qu'on sous-entend que ça va lui passer, que c'est juste le propre de l'adolescence.

En plus, il assiste à des manigances et machinations autour de la séduction partout autour de lui, excitant en diable! Il veut juste participer à la partouze qu'il devine à peine...

Et la belle Suzanne, elle est soprane ou bedon un peu plus grave? J'ai un blanc, là.

Le professeur masqué a dit…

PMT: Pfffff... Je suis sûr que madame PMT a malheureusement constaté que ce n'est pas la longueur qui compte...

unautreprof a dit…

PM et PMT : Faut savoir utiliser judicieusement du tiret. Sans retenue et partout, c'est de l'abus.
Je préfère un tiret timide bien utilisé qu'un trop ostentatoire et dodu.

Bon, je vais aller muer là... ça va me calmer le pompon.

Unknown a dit…

J'adore!!!!!! :-D
Enfin, le prof est de retour! héhé..